« L’auteur du meurtre étant un psychopathe, il est impossible de tirer de son acte des conclusions sur la société italienne. Mais il est évident que la structure de celle-ci est différente de la structure de la société française. L’Italie est par tradition un pays d’émigration. Elle n’a découvert l’immigration qu’au début des années 1990, avec la chute du régime communiste en Albanie et l’arrivée d’un nombre important de réfugies en provenance de ce pays, ainsi que l’arrivée de domestiques en provenance des Philippines ou d’Afrique de l’Ouest, employés par la riche bourgeoisie romaine ou milanaise.
Pour faire face au besoin important de main-d’œuvre dans le Nord du pays, ou le chômage est très bas, mais aussi ailleurs, notamment pour s’occuper des personnes âgées, le gouvernement Berlusconi a appliqué, comme les gouvernements de gauche, un système de quotas migratoires pour filtrer les migrants. Il s’agissait d’attribuer des quotas à des pays d’Europe de l’Est, plutôt que d’Afrique, afin de faire venir une immigration catholique ou orthodoxe.
En dix à quinze ans, le nombre d’immigrés est donc passe de zéro ou presque à plus de quatre millions. Cela a favorisé la montée d’un discours xénophobe, au sein de la Ligue du Nord par exemple. Celle-ci puisait déjà depuis ses origines dans le registre xénophobe, mais en opposant les Italiens du Nord aux Italiens du Sud.
L’Italie n’est donc pas encore tout à fait habituée à l’immigration. Quand le footballeur d’origine ghanéenne Mario Balotelli a été titularisé dans l’équipe nationale, certains ont changé qu’il ne pouvait pas exister de « nègre italien.» Si vous regardez la composition de l’équipe italienne de football lors de la finale de la Coupe du monde contre la France, en 2006, il n’y a aucun Noir. C’est comme si, sur ce plan-là, l’Italie avait vingt ou trente ans de retard par rapport à la France.
II est possible que la crise aggrave ce racisme mais ce n’est pas propre à l’Italie. Si l’on se penche sur les résultats des élections en Europe depuis 2008, il y a partout, ou presque, en Hongrie, en Suède, en Finlande, une percée des partis populistes et racistes ».