• [Pierre Verluise->http://www.iris-france.org/cv.php?fichier=cv/cv&nom=verluise]

Le PIB espagnol pèse environ un neuvième du PIB de la zone euro. Quatrième économie de la zone euro, l’Espagne semble cependant en difficulté. Les bons du Trésor espagnol s’échangent début décembre 2010 à un prix deux fois supérieur à ceux du Trésor allemand. Pourtant, le niveau de la dette publique espagnole n’est “que” de 63,2% du PIB, très en dessous des 118% de l’Italie, sans parler des 130% de la Grèce. Certes, en 2010, le déficit public espagnol avoisine 9,3% du PIB, mais l’année précédente était pire (11%).

Que s’est-il passé ?

Après des années de croissance économique significative, l’Espagne a été frappée de plein fouet par la crise venue des Etats-Unis. Le taux de croissance du PIB espagnol en 2008 a été de 0,9%, et de – 3,7% en 2009. La bulle de spéculation immobilière a éclaté comme une bulle de savon, avec un brutal retour au principe de réalité: 20 % de la population active se trouve au chômage en 2010. Soit le taux de chômage le plus élevé des 16 pays de la zone euro comme des 27 pays de l’Union européenne. Ce qui pèse non seulement sur la croissance économique de 2010 (prévision -0,4%) mais encore sur les perspectives de reprise. Quand un actif sur cinq est à la recherche d’un emploi, cela ne peut que pénaliser la consommation, donc les rentrées fiscales. Pour faire bon poids, la classe politique est divisée quant à la conduite à tenir.

Démographiquement et économiquement, l’Espagne est un pays charnière.

Démographiquement, l’Espagne ne compte pas parmi les pays les plus peuplés de l’Union européenne (Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie)… ni au nombre des Etats de moins de 1 million d’habitants (Chypre, Luxembourg, Malte). Avec 46 millions d’habitants, l’Espagne est le 5e pays le plus peuplé de l’UE-27, à la charnière des pays les plus peuplés et les moins peuplés. Comme la Pologne, l’Espagne est un “poids moyen” qui entend bien évidemment tirer le plus des bénéfices de cette position, notamment sur le plan politique. L’Espagne partage cependant avec d’autres pays une faible fécondité (1,4 enfants par femme) et un vieillissement accéléré. Selon les prévisions d’Eurostat, sa population devrait sérieusement décliner entre 2025 et 2050. (http://www.diploweb.com/IMG/pdf/atlas-ue.pdf, carte des perspectives démographiques de l’UE de 2025 à 2050). Ce qui ne saurait rester sans incidences économiques.

Economiquement, l’Espagne affiche pour l’heure un PIB proche de la moitié du PIB français. Le PIB espagnol par habitant en Standard de pouvoir d’achat (SPA), UE-27 base 100, est de 104. Autrement dit, le niveau de vie espagnol est proche du niveau de vie moyen de l’UE élargie (100). La productivité espagnole est de 94% de celle de l’ex-UE-15, soit les pays entrés au plus tard en 1995 dans l’UE. Existe-t-il ici une marge de progression ? C’est la conviction de la Banque centrale européenne qui déclarait hier à Paris par la bouche de son Président, Jean-Claude Trichet: “La BCE dit à l’Espagne, comme à d’autres pays de la zone euro d’ailleurs: ‘Donnez-vous les moyens de rendre crédibles vos objectifs, notamment en matière de déficit public. Prenez des mesures pour augmenter la flexibilité de l’économie afin d’élever votre potentiel de croissance. Faites les réformes nécessaires pour accroître la compétitivité de votre économie’ “.

Enfin, l’Espagne pourrait être un pays charnière sur le plan budgétaire. Compte tenu du volume de son économie, une aide financière à l’Espagne risquerait – peut-être – d’épuiser le filet de sécurité de 750 milliards d’euros constitué par la zone euro, l’UE et le FMI.

Objectif pour l’Espagne comme pour l’ensemble de la zone euro: construire une économie plus solide et plus résiliente.