La guerre en Ukraine a fait basculer notre industrie d’armement d’une industrie formatée pour le temps de paix à une industrie qui doit adapter sa production au temps de guerre.
Dès le 24 février 2022, il était clair qu’aucun pays européen ne tolérerait que les frontières du continent soient remises en cause par la force. Nous étions donc appelés à devenir la base arrière de l’Ukraine pour lui fournir les armements et les munitions qu’elle ne pouvait fabriquer elle-même en quantité suffisante – pour rappel, leur haut niveau de consommation n’a plus été constaté depuis la Seconde Guerre mondiale.
Dès le 13 juillet 2022, le Président de la République a utilisé l’expression d’« économie de guerre ».
Cela ne veut pas dire que les Français sont en guerre et que toute notre économie doit basculer pour soutenir un effort de guerre. Cela ne concerne qu’une partie de nos industries d’armement qui doivent fournir davantage de matériels nécessaires, et plus vite. Or, cette tâche n’est pas si aisée.
La remontée en puissance de l’industrie d’armement nécessite de redimensionner toute la chaîne d’approvisionnement jusqu’aux composants et matériaux critiques, de faire appel à du personnel compétent pour assurer le surcroît de production, voire de développer de nouvelles lignes de production. Ce sera le cas notamment pour la fabrication de poudres : Eurenco va la relocaliser à Bergerac, avec une capacité supérieure aux besoins de l’armée française.
Ce défi dépasse en effet le cadre français, il concerne tous les pays européens. L’accroissement des capacités de production implique un coût que les entreprises ne peuvent assumer que si des garanties leur sont données en termes de commandes. Pour ce faire, des solutions sont en cours d’élaboration au niveau européen. Objectif : mutualiser les achats des États membres. Dans le cadre de la Facilité européenne pour la paix[1], un instrument portant sur les acquisitions de munitions pour l’Ukraine pourrait voir le jour.
La Commission européenne développe également deux autres dispositifs[2] pour que l’acquisition d’armement en commun devienne la règle.
Cela permettrait à la fois de soutenir l’industrie d’armement européenne et d’accroître notre autonomie stratégique. La Commission envisage aussi de renforcer la politique de remontée en puissance de l’industrie de défense par des aides spécifiques. Si toutes ces initiatives devaient voir le jour, cette situation de crise aura permis à l’Union européenne de réaliser un bond en avant, à l’instar de l’acquisition de vaccins lors de la pandémie de Covid-19.
Une tribune publiée dans le dossier « Produire plus et plus vite, le défi ! » du septième numéro d’Esprit défense, le magazine trimestriel du ministère des Armées.
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