Les relations entre le Maroc et la France traversent une période tumultueuse depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir. Le séisme qui a frappé la région d’Al-Haouz est venu exacerber ces tensions. S’agit-il d’un simple refroidissement des liens entre les deux pays ou bien d’une rupture ?
Parler de rupture serait très exagéré, mais il est indéniable qu’il y a un léger coup de froid dans les relations entre le Maroc et la France. Il n’est pas anodin que le Royaume ait accepté l’aide de quatre pays après le séisme qui l’a cruellement frappé, et décliné celle de l’Hexagone. Beaucoup de Français ont été surpris par cette décision, car ils sont moins informés sur l’état de la relation bilatérale que les Marocains entretiennent avec le peuple français.
Quel est le degré d’influence de la géopolitique dans cette relation tendue inédite entre Paris et Rabat ?
Il y a bien sûr des relations personnelles entre les deux chefs d’État qui pourraient être meilleures. La question des visas a eu, également, un fort impact sur cette relation (et là aussi il y a une sous-estimation de son importance par une large partie de l’opinion française), mais, en réalité, le problème est avant tout géopolitique. En effet, le Maroc n’apprécie pas les efforts que Paris fait à l’égard d’Alger en estimant qu’ils sont vains. Mais c’est surtout la question du Sahara qui pose problème. Sur ce sujet essentiel, la position française était auparavant jugée de façon positive par Rabat. Celle-ci n’a pas changé mais comme les États-Unis, et également Israël, reconnaissent désormais la pleine souveraineté du Maroc sur le Sahara, la position française apparaît donc bien en retrait et déçoit le Maroc.
Le Maroc est aujourd’hui une puissance régionale qui compte. Est-ce un facteur aggravant dans cette équation complexe ?
Le Maroc est, en effet, une puissance régionale qui compte et s’affirme de plus en plus. Mais sa montée en puissance ne peut en rien gêner la France, bien au contraire. Paris ne peut que se féliciter de voir une nation avec laquelle il a tant de proximité et d’affinités, peser de plus en plus sur la scène régionale et mondiale.
Comment voyez-vous l’avenir des relations entre deux pays intimement liés ? Êtes-vous optimiste ?
Je ne suis ni optimiste ni pessimiste. Je suis lucide. Il faut reconnaître que les relations ont connu des temps meilleurs, mais également des crises bien plus profondes. Nous avons besoin l’un de l’autre et il nous faut parler franchement des points de désaccord, mais aussi mettre en perspective tout ce qui nous unit. Et s’il y a un léger froid dans les relations entre les autorités gouvernementales, c’est aux sociétés civiles de prendre le relais. Il y a tellement de liens personnels entre nos deux sociétés !
Propos recueillis par Nizar El Omrani pour L’Opinion Maroc.