Les célébrations du 14-Juillet sont souvent pour la France l’occasion de se mettre en scène et d’afficher sa grandeur aux yeux du reste du monde. Mais cette année, c’est plutôt l’image d’une France en panne et en déclin qui domine. Le jugement du monde extérieur est sévère sous l’effet d’un triple facteur. Les évolutions géopolitiques mondiales, des choix stratégiques défaillants et des problèmes intérieurs qui minent l’image de la France.
La France était à peine sortie de la séquence de la réforme des retraites qu’émeutes et pillages ont éclaté à la suite de la mort du jeune Nahel, tué par un policier. Elles ont fourni aux télévisions du monde entier des images-chocs d’un pays livré à la violence et matière à moult débats sur les divisions profondes et jugées inacceptables de la société française. Deux visites d’État annulées (Royaume-Uni, Allemagne), cela fait désordre.
Le choix de donner une approche avant tout militaro-sécuritaire à la politique africaine du pays, négligeant les aspects sociétaux, a rendu la France impopulaire sur un continent où elle pensait son influence incontournable. Accuser la propagande russe ne peut exonérer de réfléchir aux raisons de l’échec si on veut rebondir.
Le sommet sur le nouveau pacte financier mondial
Ce n’est pourtant pas en pratiquant ce type de surenchère atlantiste que la France pourra retrouver une position plus enviable. Ce n’est pas en s’autoflagellant et en renonçant aux fondamentaux de la Ve République qu’elle rebondira. Le retour à une diplomatie du type IVe République – alignement atlantiste et le Sud vu comme un danger – nous fournira peu d’occasions de briller et beaucoup de nous enfoncer un peu plus.
La France est un pays occidental, mais ne peut se résumer à cette seule identité stratégique. Elle est aussi une nation globale. Au moment où le fossé entre l’Ouest et « le reste » devient de plus en plus grand et inquiétant, elle a un rôle à jouer pour servir de pont entre les deux, comme elle le fait régulièrement depuis la création de la Ve République. À cet égard, le sommet sur le nouveau pacte financier mondial est une réussite. Au moment où certains veulent faire croire que la nouvelle division géopolitique est celle entre démocraties et dictatures, la France ne pourrait-elle pas relancer le débat sur l’élargissement du Conseil de sécurité de l’ONU, sujet central pour les trois démocraties des Brics, l’Afrique du Sud, le Brésil et l’Inde ? Cela implique de ne pas faire dépendre notre politique de la recherche de la cohésion occidentale ou européenne.
Au moment où Washington cherche à établir un containment global de la Chine, la France doit refuser de servir de supplétif aux États-Unis dans leur lutte avec Pékin pour la suprématie mondiale. Les Européens et la France doivent, face à la Chine, avoir leur propre politique et défendre leurs intérêts spécifiques. Évitons l’engrenage de crisper la Chine en suivant une politique d’endiguement : crispations qui justifieraient de muscler ce même dispositif anti-Pékin en provoquant une crispation supplémentaire de la Chine. Cette dérive dangereuse est à l’œuvre et il faut l’empêcher de se poursuivre.
Une tribune publiée par La Croix.