Faut-il s’attendre à une riposte de la part de l’Iran après la mort d’Hassan Nasrallah ?

L’Iran n’est pas concerné sur son sol, mais elle l’est politiquement puisque l’offensive se déroule contre le Hezbollah. Je n’ai jamais considéré que ce dernier était seulement et uniquement un proxy de Téhéran, mais nul ne peut nier les liens étroits entre l’Iran et le Hezbollah. Pour autant, les Iraniens ne riposteront pas – en ce sens Israël a marqué des points – car la situation de l’Iran n’est pas au beau fixe. Tout d’abord pour des raisons économiques, le pays étant dans une situation terrible. Mais aussi sur un plan politique, notamment à cause du mouvement de contestation qui a fragilisé le régime en 2022. À cela s’ajoute l’accident mortel du président Raïssi, puis les élections présidentielles.

Les Iraniens sont dans un contexte d’affaiblissement. C’était déjà le cas en avril dernier, après la frappe contre la mission diplomatique à Damas : Téhéran avait prévenu à l’avance de son offensive pour ne pas faire de véritables dégâts. Ce n’était qu’un avertissement symbolique.

Cette fois-ci, alors que les tensions ont encore monté, ils sont piégés. Ils se déconsidèrent eux-mêmes : ils évitent le combat. Pour une raison fondamentale : à la vue des tensions régionales, des coups portés par Israël contre Gaza puis au Liban, ils ont compris que leur garantie fondamentale était l’arme nucléaire.

C’est-à-dire ?

L’obsession de Téhéran est de parvenir dans les meilleurs délais à obtenir l’arme nucléaire. Ils savent qu’une fois qu’ils l’auront, ils seront protégés. Ils savent aussi que la Russie ou la Corée du Nord ne sont pas attaquées grâce à cette dissuasion nucléaire. Ils ne veulent surtout pas gâcher cette possibilité ces jours-ci avec un conflit, qui serait d’ailleurs asymétrique.

Quid de l’attitude d’Israël ?

Les dirigeants israéliens ont un objectif : régionaliser le conflit. C’est la meilleure garantie qu’ils puissent gagner à nouveau le soutien inconditionnel des puissances occidentales. On a vu les critiques de la part de ces derniers, lesquels réclament un cessez-le-feu au plus vite. Tout cela est très rhétorique : leur soutien, notamment celui des Américains, n’a jamais cessé et les livraisons d’armes se poursuivent quotidiennement .

À défaut d’un conflit ouvert, vont-ils continuer à soutenir le Hezbollah sur le sol libanais ?

Le Hezbollah a subi des coups très durs, une partie de sa chaine de commandement est anéantie. Des dirigeants sont morts, des agents israéliens ont pu le pénétrer ou ont réussi à retourner des membres – je pense à l’attaque des bipeurs. Le Hezbollah, qui jouissait d’une aura de discipline et d’efficacité, est très entamé. Pour autant, il n’est pas mort, la relève est prête. Une partie du Hezbollah possède un appareil clandestin. Ils ne sont pas morts ni à genoux. C’est comme un boxer groggy debout : ils ne sont pas K.-O.

 

Propos recueillis par Thomas GUIEN pour TF1 info.