La Russie a accusé, ce samedi 18 mai, le régime de Kiev de l’avoir attaquée avec des bombes guidées françaises Hammer. En a-t-on des preuves ?

Notre ministère de la Défense a démenti, pour ce qu’il en savait, l’utilisation de bombes françaises pour atteindre le territoire russe. En effet, les conditions posées à l’Ukraine pour la fourniture de ces armes ne prévoient pas une telle utilisation. Et je pense que l’armée française présuppose que les Ukrainiens ont respecté ces conditions. Toutefois, il faut reconnaître que l’on ne maîtrise pas nécessairement la façon dont l’Ukraine s’organise pour accomplir une mission en territoire russe…

Ces conditions nous permettent-elles de ne pas être considérés comme des belligérants ?

Oui, car la Russie peut exploiter l’usage d’armements occidentaux contre son armée ou ses installations, sur son propre territoire, comme un argument pour faire monter la tension. Cela lui permet de formuler des menaces de représailles, ce qui est la grande crainte des Occidentaux. Voilà pourquoi, jusqu’à présent, les avions et l’armement longue distance ne sont pas livrés.

Quelles pourraient être les conséquences de cet épisode pour la France ?

D’abord je ne pense pas que l’usage de bombes françaises ou occidentales sur le territoire russe va nous amener à une intensification du conflit, ou de représailles armées de la part de la Russie. Mais les représailles peuvent se manifester de manière indirecte par des cyberattaques, par de la désinformation ou par du contournement, autrement dit par des stratégies militaires indirectes. Nous en avons déjà fait les frais : depuis le début de la guerre en Ukraine, la France a été chassée du Niger, du Mali, ou de la République centrafricaine… par les Russes.

Selon vous, des armes occidentales finiront-elles par être utilisées contre la Russie sur son propre territoire ?

Vous savez, lorsqu’Emmanuel Macron suggère d’envoyer des troupes au sol en Ukraine, c’est beaucoup plus grave, en termes d’engagement dans la guerre, que de voir nos armes détruire un dépôt de carburant russe… Les choses pourraient bientôt changer en effet. Le président américain a annoncé qu’il allait autoriser la livraison à l’Ukraine de missiles ATACMS de 170 et 300 kilomètres de portée. À cette distance, où que l’on se trouvera sur un territoire tenu par les Ukrainiens, on pourra atteindre la Russie.