Avec ces différentes attaques ukrainiennes que nous pouvons voir depuis le début de semaine ne serait-ce donc pas le début de cette fameuse contre-offensive ?

En regardant avec du recul, ces attaques n’apportent pas grand-chose pour une offensive. Il faut des évènements d’une ampleur assez importante pour parler de contre-offensive. Frapper les dépôts de carburants et munitions, les lignes stratégiques des forces russes sont des signes avant-coureurs d’une attaque massive. Cela cache sûrement le fait que cette grande attaque n’est pas encore prête mais qu’il faut tout de même maintenir une sérieuse pression sur les lignes ennemies.

Comment pourrait donc se passer la contre-offensive ukrainienne ? 

De ce que le gouvernement ukrainien et les alliées décrivent, cette grande offensive doit avoir pour but de chasser du territoire ukrainien les forces russes. Elle doit permettre d’abord d’enfoncer les premières lignes qui, depuis le début du conflit, se sont considérablement renforcées. Elle doit ensuite permettre de libérer l’ensemble du territoire ukrainien.

Est-ce qu’aujourd’hui cette contre-offensive est possible avec la force de frappe de l’armée ukrainienne, ou vaut-il mieux attendre ? 

Cette guerre a une dimension psychologique et médiatique, l’Ukraine ne peut donc pas rester passive lorsque l’on parle de cette offensive depuis très longtemps. Elle doit réconforter sa population qui subit depuis plus d’un an, faire craindre au gouvernement russe une frappe importante mais aussi obtenir des Etats occidentaux des moyens supplémentaires. Pour l’instant, les moyens supplémentaires ne sont pas au rendez-vous, puisque au-delà des moyens matériels (aviations et armement), cette guerre nécessite des moyens humains. L’Ukraine a perdu beaucoup d’hommes dans ces affrontements finalement.

Est-il possible que des troupes de militaires soient mises à disposition des Ukrainiens pour cette offensive ? 

Si des troupes sont constituées sous un même uniforme (européen, OTAN, américain), nous passerions d’une guerre entre deux pays à une guerre à l’échelle de l’Europe. Et les pays alliés, déjà réticents pour certains à envoyer des avions ou autre type d’armement, ne se voient pas envoyer des troupes dans le conflit. Pour les forces humaines, c’est à l’Ukraine de reconstituer sa force militaire. C’est un travail interne qui doit être réalisé, car l’Europe et les pays alliés ne s’enliseront pas dans un conflit externe à leur territoire.

Lorsque cette offensive aura lieu, il n’y aura donc plus aucun doute sur le fait qu’elle soit lancée ?

Complètement. Nous voyons des petites attaques ponctuelles qui n’ont pas une grande ampleur. Les forces russes sont sur une ligne de défense qui est bien matérialisée avec une stratégie très défensive : il faut entre 6 et 8 militaires ukrainiens en attaque pour 1 seul militaire russe. Aujourd’hui, l’Ukraine n’a pas les moyens humains et matériels pour enfoncer de telles lignes défensives. Depuis mars 2022, les forces militaires russes occupent les régions entre Louhansk et Zaporijia, ils ont eu le temps de préparer le terrain à une énorme offensive. Il faut à l’Ukraine de la masse, et de la puissance de feu pour les déloger.

Faut-il donc attendre d’autres fournitures d’armes comme les avions pour espérer un retrait des troupes russes installées du côté ukrainien ? 

Depuis trois mois, l’Ukraine cherche à récupérer des munitions de la part des pays Occidentaux. Le plan européen de relance de fabrication de munitions arrive seulement, et pour enfoncer ces lignes défensives russes, il en faut énormément. Tout cela nous fait penser que l’offensive aura peut-être lieu à la fin de l’année.

 

Propos recueillis par La Depeche.