Pour le moment la Turquie a décidé d’ouvrir ses portes aux réfugiés syriens qui fuient leur pays. Mais « le pays va rencontrer des problèmes de gestion ». Pour Alican Tayla, La Turquie est confrontée à un test inédit pour asseoir sa diplomatie.
D’une part, la Turquie est perçue comme une des régions les plus sûres, et ce, malgré les situations de conflits intérieurs qu’il a pu avoir, notamment sur la question kurde. D’un autre coté ces révoltes sont arrivées dans une période de contexte d’apaisement entre la Syrie et la Turquie.
Il y a une réelle sympathie, de la part du gouvernement comme de la population, envers ces réfugiés qui fuient une violence meurtrière. Il faut rappeler que le régime en place n’est pas à l’image du peuple qui se révolte. La grande question est de savoir si cette perception sera encore favorable quand les réfugiés continueront d’affluer et que le pays rencontrera des problèmes de gestion.
La question des infrastructures et de la gestion administrative se pose. Et la Turquie va devoir apprendre assez vite, qu’elle le veuille ou non. En termes d’accueil dans une crise humanitaire, elle n’a pas d’expérience. Si elle prend le rôle de médiateur, elle doit le tenir et faire tous les efforts nécessaires jusqu’à ce que la situation se calme. Sinon, si elle décide de fermer ses portes, je vois mal comment elle va pouvoir faire face au peuple arabe ainsi qu’à sa population, favorable à ces réfugiés.
1er scénario: Les forces syriennes interviennent avec violence, qui conduit à un conflit avec les réfugiés à la frontière… Je ne l’espère pas. En tout cas, il faut savoir que la Syrie ne pourra pas intervenir au-delà de ses propres frontières.
2ème scénario: Un nombre de réfugiés de plus en plus important qui conduirait, je ne pense pas à une fermeture des frontières, mais certainement à une zone de sécurité au sein de celles-ci.
La condition de « réfugié » n’est pas tolérable très longtemps. Pour l’instant je pense qu’ils sont dans l’attente. Si la situation se dégrade, des problèmes de santé et de sécurité surviendront…j’espère que ça n’en viendra pas là.
Non je ne pense pas. C’est un pays limitrophe, on ne veut pas que le pays voisin soit en situation de guerre, d’autant plus que cela signifierait que l’afflux de migrants serait plus important.
Depuis quelques années, les propos diplomatiques prônent le « zéro problèmes avec nos voisins ». D’un autre côté, le premier ministre parle de démocratisation de la Turquie avec des slogans de démocratie avancée. Mais on a vu qu’elle avait eu du mal à gérer les événements en Libye ainsi qu’en Tunisie ou en Egypte. La Turquie voudrait avoir ce rôle de médiateur mais je ne suis pas sûr qu’elle soit fin prête à jouer ce rôle. Elle n’a pas encore d’expérience de gestion pour ce genre de situation. Après les révolutions du printemps arabe, la Turquie joue un rôle délicat et subit en ce moment un véritable test diplomatique.
En tout cas les engagements de la Turquie sont toujours les mêmes et ne changeront pas. Elle est membre de l’Otan et alliée des États-Unis et Israël reste un allié stratégique de premier plan et ce, malgré les tensions. Être allié stratégique d’Israël et tenter un rapprochement avec l’Iran ou la Syrie est extrêmement compliqué. Nous verrons, c’est encore trop tôt pour savoir.
Il est extrêmement difficile de qualifier la Turquie de modèle pour les droits de l’homme. Déjà avec les événements de 1990 sur les affrontements entre militants kurdes… De plus, il ne faut pas oublier que les deux gouvernements (Syrie et Turquie) entretenaient tout de même des relations privilégiées. Il reste toujours un certain nombre de dérives en Turquie, comme les cas de censure…. Youtube était fermé pendant plusieurs mois. Il y a aussi les journalistes jetés en prison.
Pourquoi rajouter de l’huile sur le feu ? Malgré l’ouverture de ses portes et malgré les déclarations contre Bachar al Assad, je pense qu’elle souhaite tout de même garder une certaine neutralité et ne pas rajouter de tensions.