Israël-Palestine : oser une solution politique

2 min. de lecture

Le rapport de la rapporteuse spéciale des Nations unies est dévastateur : Israël a détruit Gaza. Plus de 30 000 Palestiniens sont morts, dont plus de 13 000 enfants. Plus de 12 000 personnes sont présumées mortes et 71 000 blessées, dont beaucoup souffrent de mutilations qui les affecteront à vie. 70% des zones résidentielles ont été détruites. 80% de la population a été victime de déplacements forcés.

Rien ne justifie des crimes de guerre qui pourraient être qualifiés de génocide par la Cour internationale de justice (CIJ), pas même l’horrible massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre. On ne peut pas répondre à la barbarie par davantage de barbarie.

La destruction de Gaza marquera un avant et un après. Non seulement en raison de l’ampleur des destructions, mais aussi en raison de l’implication d’un acteur particulier : Israël. À juste titre, Edgar Morin, l’un des plus grands intellectuels vivants, juif et résistant au nazisme, s’est déclaré étonné et indigné devant l’horrible tragédie contenue dans le fait que les descendants d’un peuple persécuté pendant des siècles pour des raisons religieuses ou raciales sont aujourd’hui les dirigeants de l’État d’Israël qui cherche à coloniser tout un peuple, en l’expulsant d’une partie de ses terres et qui, après le massacre du 7 octobre, a perpétré un véritable carnage sur les populations de Gaza.

Il faut faire la distinction entre le peuple juif, Israël et le gouvernement Netanyahu. Ce n’est pas la même chose. Les millions de Juifs de la diaspora ne sont pas des Israélites. Et une majorité du peuple israélien s’est manifesté ouvertement contre Netanyahu jusqu’au fatidique 7 octobre. La guerre déclarée par Netanyahu a tout bouleversé. C’est exactement l’objectif qu’il poursuivait : mettre derrière lui tout le peuple juif en quête de vengeance.

Comme beaucoup, je suis un admirateur du peuple juif, de ses talents et de sa résilience. J’admire également la manière dont Israël a construit une démocratie solide et une économie innovante et dynamique. Cependant, la brutalité de la guerre menée par Netanyahu n’a fait qu’étendre l’antisémitisme qui s’est historiquement propagé comme un cancer à travers le monde. Il faut l’arrêter court. Il est essentiel pour cela qu’un courant s’exprime au sein du peuple juif qui sépare clairement les eaux des actions du gouvernement d’Israël ; qu’il ne devienne pas complice de crimes de guerre et ne justifie pas l’injustifiable. Ce n’est pas facile. Les blessures qui se sont ouvertes le 7 octobre sont profondes. Il faut beaucoup de courage pour s’opposer au gouvernement dans des conditions de guerre. L’ancien ministre israélien des Affaires étrangères, Shlomo Ben-Ami, a qualifié le gouvernement de Netanyahu de « gouvernement extrémiste » et préconise un nouveau leadership qui sortirait son pays de l’isolement. Espérons qu’il soit écouté.

Il faut des dirigeants juifs qui osent et qui persévèrent pour parvenir à une solution pacifique basée sur la reconnaissance des deux États coexistant au sein de frontières sûres et internationalement reconnues.

———————————–

Carlos Ominami est ancien ministre de l’Économie du Chili, chercheur associé á l’IRIS. Ce texte a été initialement publié au Chili le 28 mars 2024 dans La Tercera.

Programmes et observatoires associés