Je ne crois pas qu’il y aura un effet domino comme cela s’est produit à l’Est de l’Europe à la suite de l’effondrement de l’URSS. En revanche, je crois que tous les pays du monde arabe vont, en effet, être touchés par cette onde de choc. Mais selon des modalités diverses, car ces pays sont tous différents. On constate d’ailleurs que les formes de ces révolutions sont diverses. En Tunisie, il s’agit d’une véritable révolution populaire. En Libye, la révolution s’apparente à une guerre civile. En Egypte, elle tient à la fois de la révolution populaire et de la révolution de palais. Enfin, je voudrais ajouter que ce mouvement ne se limitera pas, à mon avis, au seul monde arabe. L’Afrique noire ne sera pas épargnée. L’Asie non plus.
C’est à espérer car ce regard a trop longtemps été hypocrite. D’un côté, nous faisions la promotion de la démocratie. D’un autre, nous soutenions des régimes indéfendables au nom de notre goût de la stabilité et de notre crainte de l’islamisme. Une vieille habitude d’ailleurs puisque, au temps de la guerre froide, nous avons agi de même pour, disions-nous, contenir le communisme. A cet égard, la Tunisie et l’Egypte ont agi comme un réveil matin. Brusquement, nous avons découvert que les peuples arabes avaient des aspirations que nous ne percevions pas.
C’est certain. L’Histoire s’écrit sous nos yeux, il y aura des difficultés et des échecs. II ne faut pas croire que, d’un coup de baguette magique, les 22 pays arabes se transformeront en autant de démocraties à la norvégienne. La démocratie est à l’évidence un régime infiniment meilleur que ceux qui règnent encore là-bas. Mais, pour autant, elle ne va pas résoudre instantanément tous les problèmes qui peuvent se poser. Reste que nous serons néanmoins confrontés à une situation meilleure. Même si ce n’est pas la fin de tous les blocages dont souffrent ces sociétés, gageons qu’à terme les répressions seront balayées.
Ils auront, je pense un effet de rappel à l’ordre Tchernobyl avait déjà rempli ce rôle. Mais, alors, la catastrophe s’était produite dans une démocratie populaire ou le niveau de technologie n’était pas si avancé que le nôtre. Avec Fukushima, il en va autrement. Cette fois, le drame se déroule dans un pays parmi les plus développés et cela nous questionne sur le degré de sûreté de nos centrales nucléaires et sur l’avenir de cette filière. Pour autant, je n’imagine pas que les évènements de Fukushima nous conduisent à une remise en cause de l’énergie nucléaire. En d’autres termes, il n’est pas si facile que cela de débrancher la prise. En revanche, l’idée que les Etats doivent obligatoirement participer au capital des sociétés qui exploitent le nucléaire va en sortir renforcée.