• Interview de [Philippe Hugon->http://www.iris-france.org/cv.php?fichier=cv/cv&nom=hugon] par Corentin Chauvel

Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), analyse pour 20minutes.fr l’évolution de la situation dans le pays…

Acculé par le mouvement d’insurrection qui enflamme la Libye et condamné unanimement par la communauté internationale, le régime de Mouammar Kadhafi perd toujours plus de terrain. Pour Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), les jours du «guide de la Révolution» sont comptés.

Que peut-on dire de l’attitude jusqu’au-boutiste de Mouammar Kadhafi?

Ses derniers discours ont mis l’accent sur des points qui peuvent l’aider. Il dit être un rempart contre l’islamisme, contre Al-Qaida, et veut s’imposer comme un pilier des valeurs traditionnelles qui ne sont plus reconnues par les jeunes. Il a ainsi voulu obtenir l’appui des chefs de tribus, des personnes âgées et des occidentaux. C’était rusé, mais Mouammar Kadhafi ne contrôle plus grand-chose, il est complètement déconnecté de la réalité. Il s’agissait de discours de fin de règne, son système s’effondre et son départ risque de se dérouler dans un bain de sang.

Combien de temps peut-il encore tenir au pouvoir?

C’est une question de jours, mais on ne connaît pas l’importance des appuis de ses mercenaires et de sa garde prétorienne. Cependant, il y a une défection croissante de ses proches qui anticipent son départ et la poursuite d’un régime dynastique, par l’intermédiaire de ses fils, n’est pas envisagé. S’il choisit la fuite, pas mal de dictateurs peuvent l’accueillir dans des pays amis. Après, il peut aussi tenir un certain temps dans un bunker et terminer comme un martyr. C’est un homme imprévisible, qui n’est pas totalement dans la raison.

Comment peut se dérouler sa succession?

C’est très compliqué. Il n’y a pas d’administration ni d’armée structurée, il y a des risques que cela finisse à l’irakienne. Cela ne se passera sûrement pas comme en Tunisie ou en Egypte car il n’y a même pas de force politique, c’est un peu le vide et l’inconnu. On s’oriente ainsi vers de violents conflits tribaux. Il pourrait seulement y avoir un accord si quelqu’un émerge au-dessus de la mêlée, comme l’avait fait Mouammar Kadhafi. Mais si cette personne, ce sage, accepté par les différentes forces en présence, n’apparaît pas, alors c’est un enchaînement de la violence qui est à redouter.