Après dix ans de guerre, l’Afghanistan semble loin de retrouver la paix. Alors que la France, après les Etats-Unis, a annoncé le retrait partiel de ses troupes, la situation sur le terrain reste très tendue. Directeur de l’Institut des relations internationales et stratégiques, Pascal Boniface décrypte la situation.
On peut s’interroger sur le lien entre cette attaque et la visite de Nicolas Sarkozy dans ce pays mardi dernier, même s’il n’y a sans doute pas de rapport direct. Un attentat est en effet très long à préparer. En tout cas, le message que semblent vouloir envoyer les talibans est clair : ce sont eux qui décident, ce sont eux qui ont la maîtrise du terrain et de l’agenda. On peut relier cet attentat avec l’assassinat du demi-frère du président afghan Hamid Karzaï. Cela va dans le sens de l’affirmation du pouvoir des talibans. C’est un signal qu’ils veulent envoyer à la coalition internationale pour lui indiquer que le vent souffle pour eux, et non pas contre eux.
Il n’y a pas de bon timing. Cette guerre dure depuis plus de dix ans. La mort de Ben Laden donne au moins la possibilité d’une issue. La prolongation éternelle de la présence militaire ne débouchera pas sur une solution politiquement satisfaisante. Si partir en bon ordre, sans donner l’impression d’une fuite qui serait une débâcle à la fois politique, militaire et stratégique n’est pas la meilleure des solutions, c’est sans doute la moins mauvaise.
En 2001, puis lors des premières années d’intervention, ils ont perdu du terrain. Puis, graduellement, ils en ont repris au point d’être aujourd’hui en position de force. Ils sont plus puissants et plus dangereux. Leur force de nuisance s’est renforcée, notamment au cours des derniers mois.
Le problème, c’est que plusieurs missions se sont superposées. Au départ, la coalition s’est engagée pour mettre Ben Laden hors d’état de nuire. Cela a été fait. Pour ce qui est de la volonté de chasser les talibans, on peut craindre que ces derniers ne reviennent au pouvoir à moyen terme. Quant à la construction d’un Etat de droit avec d’autres obligations sur le statut de la femme notamment, on peut parler d’échec. En voulant amplifier et étendre les objectifs, par rapport à ceux fixés après le 11 septembre 2001, cela s’est transformé en semi-échec.
La seule annonce d’un retrait militaire partiel ne va pas les arrêter. On peut même penser que les talibans vont les intensifier dans le dessein de montrer que ce sont eux qui ont obtenu la victoire… et qu’il ne s’agit pas d’un retrait volontaire des Occidentaux.